TEXTES : Dt 26, 4-10 / Ps 90(91), 1-2. 10-15 / Rm 10, 8-13 / Lc 4, 1-13
PREDICATEUR : P. Marcellin YAWO, SVD
THEME : Prépare-toi à subir l’épreuve !
Il est souvent dit que les âmes les plus saintes et les plus pures sont la cible des tentations. Nombreux sont les chrétiens qui sont bloqués dans d’énormes difficultés, entraves ou obstructions. D’autres passent leur vie de tentation en tentation, certains sont même sur le point d’abandonner la foi chrétienne parce qu’ils ne peuvent plus supporter les adversités. Voici ce que nous dit Ben Sira le sage : « Mon fils, si tu viens te mettre au service du Seigneur, prépare-toi à subir l’épreuve », (Si 2, 1). Ainsi, il est curieux de constater dans la bible que les impies sont souvent épargnés des épreuves, et que ce sont les hommes et les femmes de foi qui sont les plus tentés. Il en découle que la tentation est un privilège réservé aux justes, parce que comme continue Ben Sira, « … car l’or est vérifié par le feu, et les hommes agréables à Dieu, par le creuset de l’humiliation » (Si 2, 4-5). La tentation est un mouvement intérieur qui incite l’homme au mal ; c’est le moyen que Satan utilise pour amener l’homme à faire des choix contraires à la volonté de Dieu. Elle nous vient parfois comme un test, une affliction, une épreuve, une adversité… Chaque premier dimanche de carême, la liturgie nous fait voir que Jésus notre Maître lui-même a été tenté ; elle nous fait voir comment le Maître a affronté ces tentations pour nous montrer comment les reconnaitre et les surmonter à notre tour.
Dans l’évangile d’aujourd’hui, nous avons l’impression que l’expérience de Jésus ne puisse pas nous aider à fond puisque ses tentations sont trop différentes des nôtres et paraissent étranges (transformer la pierre en pain, se prosterner devant Satan, se jeter en bas du sommet du temple). Les nôtres sont beaucoup plus sérieuses et difficiles à vaincre et elles nous accompagnent toute notre vie ; pas des évènements ponctuels comme dans le cas de Jésus. Penser ainsi nous amènerait à ne pas comprendre l’évangéliste, puisque ces trois tentations ne représentent que la synthèse des nombreuses luttes – de différentes sortes – (Lc 4, 13), que Jésus a expérimenté tout au long de sa vie. La tentation de Jésus nous montre que Jésus ne va pas utiliser la toute-puissance de Dieu pour surmonter les barrières que le malin mettait devant lui, il n’a pas non plus imposé sa volonté aux éléments (1ère tentation), au monde (2ème tentation) ou à Dieu (3ème tentation). Il est donc clair qu’il a subi ces tentations dans son humanité. C’est dans cette perspective que saint Luc nous a parlé de l’humanité de Jésus tout juste avant ses tentations. Il nous dit que Jésus est Fils de Dieu, mais aussi il est fils de David. Pour vaincre les tentations du diable, Jésus utilise la force de la parole (1ère tentation), la force de l’humilité (2ème tentation) et la force de l’abandon aux mains de Dieu (3ème tentation). Du combat contre Satan, Jésus sort vainqueur. A l’invitation qui lui est faite d’adorer le pouvoir, le Seigneur oppose les paroles du Deutéronome, le livre même que le diable avait déjà cité : « C’est devant le Seigneur ton Dieu que tu te prosterneras, et c’est lui seul que tu adoreras » (Lc 4, 8 ; cf. Dt 6, 13). Ce commandement fondamental pour Israël est aussi adressé à nous les chrétiens : seul Dieu doit être adoré. C’est ici que notre tentation prend forme puisque le monde d’aujourd’hui nous propose toute sorte de choses que nous avons tendance à idolâtrer ; laissant Dieu de côté. Nous devons donc nous préparer à affronter ces tentations avec l’arme de la parole de Dieu, avec l’humilité et avec l’abandon dans les mains de Dieu, comme notre Maitre nous l’a montré. Malheureusement il nous arrive parfois de nous adresser à Dieu, ou au Christ ou à l’Eglise comme le diable l’a fait à Jésus, surtout lorsque nous traversons des épreuves, des afflictions, de l’adversité ou des persécutions : Dieu, si tu existes, alors tu dois aussi te montrer. Alors tu dois déchirer le nuage qui te cache et nous donner la clarté à laquelle nous avons droit. Si toi, ô Christ, tu es vraiment le Fils et non un des illuminés qui ont paru continuellement dans l’histoire, alors tu dois te montrer plus clairement que tu ne le fais. Alors, tu dois donner à ton Église, si elle doit bien être la tienne, un degré d’évidence d’un autre ordre…
Bien-aimé(e)s dans le Seigneur, l’évangile de ce dimanche nous a dressé le chemin que le Christ a emprunté pour combattre le malin et ses tentations. Lorsque le tentateur me propose des prix dans mon for intérieur pour m’inciter au mal, lorsqu’il me propose des biens de ce monde pour m’amener à opérer des choix qui s’opposent à la volonté de Dieu, à qui est ce que je fais recours ? à qui est-ce que je fais appel ? lorsque je me sens bloqué dans des situations complexes, vais-je continuer à croire en Dieu ? vais-je continuer à croire en sa parole ? vais-je continuer à faire ce qui est juste devant Dieu ? Ou bien vais-je laisser mes passions déréglées (l’orgueil, l’égoïsme, l’avidité pour le bien de ce monde, la jalousie, l’envie pour le succès des autres, la manie du vouloir dominer et de nous imposer, les sentiments de rancœur…) me livrer au diable. Jésus a été tenté toute sa vie mais n’a jamais laissé le malin le vaincre. Il est vainqueur de ce monde, et nous pouvons tout par le Christ qui nous fortife. (Ph 4, 13)